Cette semaine, je vous raconte une histoire. Posez-vous, c'est la mienne et celle des 15 élèves avec qui je passe une heure chaque mardi, juste avant le déjeuner. C'est celle d'un petit bonheur à partager sans modération.
Vous devez lire à voix haute ! C’est bon pour la santé, et les relations humaines.
Depuis le début de l’année scolaire, chaque mardi à 11h j’accueille 15 élèves de 5e pour un atelier de lecture à voix haute. Toutes les 3 semaines, je change de groupe.
Je les accueille au CDI, dans mon antre (le plafond est bas, y a beaucoup d’étagères et de livres à désherber, alors oui c’est une antre).
J’ai toujours le même rituel. On s’installe en cercle, on s’assoit, on se dit « Bonjour ! » en se regardant les uns les autres avec un beau sourire.
Et on démarre. Sauf que personne ne lit.
On commence toujours par un échange : qu’est-ce que tu as lu/écouté/vu que tu as aimé ? Pourquoi ? Comment l’as-tu découvert ? As-tu envie d’inviter les autres à faire cette découverte ?
Jusque-là j’ai associé cette séance de lecture à voix haute à de la prise de parole en public. Objectif : oral du brevet.
Pourtant personne ne m’avait rien demandé, c’est moi qui m’était obligé à.
Je leur fais pratiquer des jeux de virelangue (ma découverte de cette année), lire des nouvelles à chute et les commenter. Je leur apprends à écouter une histoire en audio, sans faire autre chose. Ils déclament des poèmes… bref, quand on faisait de la lecture à voix haute, c’est eux qui lisaient.
Mais hier, j’ai eu envie d’autre chose. Après notre petit tour de cercle, je leur ai demandé de s’installer sur une chaise proche d’une table, de mettre leur tête au creux de leur bras, j’ai éteint la lumière des néons et j’ai lu.
Pour la première fois, j’ai lu à voix haute.
J’ai senti les tensions se dénouer. Le calme s’installer. Leur concentration était telle que le temps s’est arrêté.
Le chapitre s’est clos, tout doucement nous sommes revenus dans notre espace temps et nous avons calmement terminé notre séance.
Pour la première fois, je me suis sentie légitime à lire à voix haute.
Enfin, j’avais moi-même cerné l’objectif de cette séance, leur donner envie de lire.
J’avais choisi un texte d’un roman présent au CDI, Les Autodafeurs de Marine Carteron. Cela fait un moment qu’il est dans ma pile de livres, mais je ne l’avais pas encore ouvert. J’aime le rythme, j’aime l’intrigue qui se dessine. Je suis heureuse de ce choix.
Je crois que ça s’est senti dans ma manière de lire.
Et quand à la récréation de l’après-midi deux élèves sont venues me voir pour me demander où elles pouvaient trouver le livre que j’avais commencé à lire à l’atelier du matin, dans ma tête j’ai sautillé et frappé des mains. Comme une gamine joyeuse. J’avais dépassé mon objectif de leur procurer du plaisir à écouter.
Elles sont reparties avec. Liront-elles à voix haute ensemble ? Le finiront-elles ? …
Je ne le saurais peut-être pas, mais ce que je sais, c’est que retrouver ma voix est un bonheur que je vais continuer à partager !
Et si ce bonheur, je le retrouve (les dernières fois c’est quand je lisais encore des histoires à mes petits devenus grands), c’est grâce à mes amies du club de lecture.
Oui, pour nos dernières retrouvailles autour d’un apéro littéraire pour les Nuits de la lecture, l’une d’elles nous a proposé de choisir un texte à lire. Je suis venue sans rien. Rien ne m’était venu. Mais j’ai ouvert mes oreilles, mon corps tout entier, à ce qu’elles avaient à m’offrir.
Et j’ai senti comme un fourmillement m’envahir. Comme si mes cellules se reconnectaient… C’était ce qui me manquait pour être complète : je lis en silence, j’écoute… et maintenant je (re)lis aussi à voix haute !
C’est une dose de bien-être qui ne coûte rien et que je vous invite à pratiquer, seul ou à plusieurs.
Alors oui, et si on lisait à voix haute ? Qu’en pensez-vous ?
PS : envie de vous partager les mots d’Anne Berest au sujet des livres dans sa vie. 💞
A la semaine prochaine !